Nos lecteurs ne cessent de nous envoyer des messages nous demandant des nouvelles sur l’affaire Romy à Londres.
Fanirisoa Ernaivo
Nous reproduisons ci-après une traduction du post de la magistrate Fanirisoa Ernaivo sur sa page Facebook :
INFOS LONDRES
L’AUDIENCE EST TOUJOURS EN COURS ET LA PROCEDURE EST COMPLETEMENT DIFFERENTE DE CELLE D’UN TRIBUNAL DE MADAGASCAR. ICI, ON EXPLIQUE EN DÉTAIL TROIS FOIS QUATRE FOIS LES RAISONS DE LA DETENTION DES ACCUSES (ROMY & TABUTEAU) ;
LA DÉFENSE DE ROMY N’A PAS ENCORE ÉTÉ ENTENDUE ET TABUTEAU NE S’EST PAS PRÉSENTE AU TRIBUNAL. IL EST RESTEEN PRISON .
LE PROCUREUR ALEX LEACH EXPLIQUE AU JURY (DES PERSONNES CHOISIES POUR AIDER LE JUGE DANS CETTE AFFAIRE), QUEL EST LE FOND DE LA POURSUITE ET QUE S’EST-IL PASSE REELLEMENT ?
😅😅 JE SAIS QUE LES MALAGASY VEULENT SAVOIR SI/
🤔 RAJOELINA A ETE MENTIONNÉ DANS L’AFFAIRE OU PAS ?
🤔ROMY EST-ELLE COUPABLE ? MËME SI ELLE A PLAIDE COUPABLE ?
🤔QUI SONT LES PERSONNALITES CITÉES QUI PEUVENT ÊTRE IMPLIQUÉES DANS CETTE RELATION ?
MAIS JE N’AI PAS DE RÉPONSE JUSQU’ICI, J’ATTENDS !
CE QUI A ETE DIT ET REDIT, C’EST QUE ROMY A UTILISE SA POSITION POUR DIRE QU’IL EST UNE PERSONNE EN QUI RAJOELINA A VRAIMENT CONFIANCE ET ELLE A DIT QUE RAJOELINA SIGNERA CE QU’ELLE LUI DIT DE SIGNER😅😅
CE QUI A ÉGALEMENT DIT C’EST QU’ILS ONT PROMIS UNE RENCONTRE AVEC RAJOELINA ET ONT DIT QUE RAJOELINA EST AU OURANT DES DÉMARCHES ACTUELLES 🤔🤔🤔
😱😱 ELLE A ÉGALEMENT DÉCLARÉ QUE DE NOMBREUSES ENTREPRISES AVAIENT DEJA FAIT CE TYPE DE TRANSACTIONS. MADAGASCAR OIL N’A PAS VOULU ACCEPTER CE TYPE DE TRANSACTION ET A ACTUELLEMENT DES PROBLEMES.
Je n’ai pas encore mentionné les entreprises qui ont travaillé avec eux et qui ont bien réussi (DONT CERTAINES à FORT DAUPHIN)
🧐🧐L’écoute de DIZAINES DE CONVERSATIONS ENREGISTREES lors de plusieurs rencontres entre Romy et Tabuteau et le PDG de Gemsfields a eu lieu hier et se poursuivra aujourd’hui.
A suivre «
Article du journal Le Monde
Nous reproduisons également ci-dessous un article de notre confrère le Monde
« Mon nom n’apparaîtra jamais, comme vous pouvez l’imaginer » : l’ex-directrice de cabinet du président malgache jugée pour corruption
Romy Andrianarisoa est accusée d’avoir demandé des pots-de-vin à une compagnie minière britannique. Son procès s’est ouvert à Londres.
Le procès de l’ancienne directrice de cabinet du président malgache Andry Rajoelina s’est ouvert mardi 6 février sous les faux plafonds tachés de la cour numéro 13 du tribunal de Southwark à Londres, avec sa moquette élimée et son système audio hors d’âge. Arrêtée le 10 août 2023, Romy Andrianarisoa est poursuivie pour corruption dans une affaire minière. Après une première journée presque entièrement consacrée à des questions préliminaires, les procureurs sont entrés dans le vif du sujet mercredi, présentant une accusation d’autant plus accablante qu’elle repose sur un flagrant délit.
Avec Philippe Tabuteau, un Français présenté comme son complice, également arrêté mais qui ne comparaît pas dans le même procès, Romy Andrianarisoa est accusée d’avoir demandé à la société minière britannique Gemfields deux paiements de 125 000 francs suisses (quelque 130 000 euros), deux autres paiements de 10 000 dollars et, surtout, une participation de 5 % dans la mine qui devait être ouverte à Madagascar, soit environ 3,5 millions d’euros. En échange, elle promettait, selon l’accusation, d’obtenir toutes les licences et autorisations nécessaires. Des négociations enregistrées par un agent infiltré de la National Crime Agency (NCA), l’agence anticorruption britannique, qui s’était fait passer pour un des intermédiaires de Gemfields.
L’affaire est doublement significative, politiquement et juridiquement. D’abord, elle touche l’une des personnalités les plus influentes de l’entourage du président Andry Rajoelina. Pendant la campagne présidentielle de novembre 2023, l’opposition malgache avait tenté d’utiliser le scandale. Plusieurs fausses informations avaient même circulé, l’une d’entre elles affirmant que Romy Andrianarisoa avait décidé de plaider coupable, ce qui était faux puisqu’elle a plaidé non coupable.
Des « honoraires » étranges
Ensuite, ce procès est une première pour le droit anglais. Une loi anticorruption de 2010 a donné à la justice des compétences extraterritoriales pour lutter contre la corruption mais, jusqu’à présent, toutes les affaires concernaient les corrupteurs, à savoir les entreprises qui versaient des pots-de-vin. Cette fois-ci, il s’agit de corruption passive, visant les personnes accusées de recevoir ou de demander de l’argent. « Ce procès crée un précédent important en étant le premier à poursuivre un officiel étranger pour corruption passive », explique Helen Taylor, de l’association Spotlight on Corruption.
L’affaire débute en 2021. Gemfields est une société minière spécialisée dans les émeraudes et rubis. Elle cherche à se développer à Madagascar. Romy Andrianarisoa, alors conseillère du président, l’apprend et contacte son directeur général, Sean Gilbertson. Une première rencontre se déroule au luxueux hôtel Sofitel St James de Londres en septembre 2021. Gemfields estime la réunion productive et conclut que la Malgache est une femme « influente ».
Le dossier piétine ensuite près de dix-huit mois, avec plusieurs réunions annulées. Faute de progrès, la société minière finit par rencontrer en février 2023 un autre contact à Madagascar, le ministre des mines, Herindrainy Olivier Rakotomalala. L’apprenant, Romy Andrianarisoa relance Gemfields et propose que Philippe Tabuteau, un Français qu’elle connaît depuis plus d’un quart de siècle, serve d’intermédiaire dans les discussions.
Rapidement, Gemfields s’inquiète, comprenant que Philippe Tabuteau lui demande des « honoraires » étranges. Le 14 avril, le Français envoie un mail précisant ses exigences : 125 000 francs suisses en échange d’une rencontre avec le président Rajoelina, la même somme lors de la signature du contrat pour ouvrir la mine et 5 % de participation. Gemfields choisit alors d’alerter la NCA, l’agence anticorruption.
« Charles », l’agent infiltré
Celle-ci fait alors entrer en jeu un certain « Charles », un nom d’emprunt. L’agent infiltré, qui doit témoigner dans le procès caché derrière un paravent, se fait passer pour un intermédiaire de Gemfields et enregistre toutes les échanges.
Mercredi, les douze jurés de la cour de Southwark ont donc entendu de larges extraits sonores des négociations de ces supposés pots-de-vin. Ainsi, le 20 juin 2023, toujours au Sofitel St James, Romy Andrianarisoa et Philippe Tabuteau sont reçus par deux dirigeants de Gemfields, dont son directeur Sean Gilbertson. Celui-ci souligne que jamais il n’a eu à effectuer un paiement simplement pour rencontrer un président. Il ajoute qu’il ne veut rien savoir de cette affaire, qu’il exige la possibilité de « complètement démentir » et que les négociations seront donc effectuées par « Charles », qui lui sert de pare-feu. Il s’en va, laissant l’agent infiltré sur place, et les discussions entrent dans le vif du sujet.
Dans l’enregistrement sonore, Romy Andrianarisoa explique qu’elle travaille pour que les mines rapportent à son pays, mais qu’elle doit aussi « gagner sa vie ». « Charles » s’interroge : « Est-ce que le président est au courant du versement de ces honoraires ? » « Non », répond sans ambiguïté sa directrice de cabinet. En gage de bonne volonté, l’agent infiltré propose d’effectuer un premier paiement de 5 000 francs suisses. « 10 000 », répond du tac au tac Romy Andrianarisoa.
La discussion tourne autour de la procédure à suivre pour effectuer le paiement. Se montrant très flexible, Philippe Tabuteau précise que l’argent peut être versé à Genève, Dubaï, Singapour ou même sur un compte aux Seychelles. Précision importante : dans aucune des entreprises enregistrées dans ces différents pays, Romy Andrianarisoa n’est désignée comme actionnaire. « Mon nom n’apparaîtra jamais, comme vous pouvez l’imaginer », explique-t-elle sans ambages.
Un jeu dangereux
Le versement peut-il être honoré en pierres précieuses, demande « Charles », qui explique que Gemfields peut en obtenir qui ne sont pas enregistrées officiellement. « On accepte des francs suisses, des pierres précieuses ou même de l’or », réplique Philippe Tabuteau, décidément serviable.
Les détails de l’accord sont finalisés dans les semaines suivantes. Une date est décidée pour le signer à Londres. Le 10 août 2023, à 16 h 17, Philippe Tabuteau et Romy Andrianarisoa entrent dans le Sofitel St James. Un quart d’heure plus tard, les discussions commencent dans une salle de réunion. La tension est palpable, Philippe Tabuteau semble se douter de quelque chose. « Je connais ce jeu et je sais que c’est dangereux », explique-t-il.
« Charles » annonce qu’il a apporté les pierres précieuses avec lui et qu’il peut leur remettre en mains propres immédiatement. Visiblement inquiète, et devant partir à Bangkok peu après, Romy Andrianarisoa refuse, préférant une « livraison » à une date ultérieure. A 17 h 22, les officiers de la NCA pénètrent dans la salle et procèdent à l’arrestation de deux suspects.
Seule dans son box vitré, souriant à sa famille venue la soutenir dans la salle, Romy Andrianarisoa ne s’est pour l’instant pas exprimée dans ce procès. Elle doit commencer sa défense la semaine prochaine.