Les actualités politiques françaises télescopent celles de Madagascar. On apprend par les réseaux sociaux que deux Français d’origine malagasy sont candidats à la députation en France.
Dorette Landerer Randriamanampisoa (notez l’absence du nom malagasy sur l’affichage), infirmière, épouse d’un boulanger, est candidate du Rassemblement National du côté d’Antibes. Dera Ratsiajetsinimaro, commercial aux Assurances AXA, est candidat LR (Les Républicains) en Alsace.
Souhaitons à ces Malagasy engagés, quelle que soient leurs convictions, d’être élus ne serait-ce que le temps d’une mandature comme Aina Kuric l’avait été en 2017 pour le compte de LRM (La République en Marche).
Quid de l’implication politique des élites malagasy ?
Quelques intellectuels se sont lancés en politique en choisissant la voie des urnes.
A l’instar de Marie Michelle Sahondrarimalala docteur en médecine et en droit privé et sciences criminelles, sans oublier une maîtrise en administration et droit des affaires, qui sera probablement élue à Fianarantsoa.
Ou de Hyacinthe Befeno Todimanana au parcours professionnel bien rempli après un diplôme de l’ICN Business School, qui s’était présenté à Antsohihy sous les couleurs de l’IRMAR. Il est arrivé 2ème avec un retard de 62 voix sur l’indépendant Rajaonarison Richard selon les résultats provisoires de la CENI. Mais la HCC fera certainement le nécessaire afin qu’il soit élu.
Ou encore le super diplômé Fienena Richard, transfuge du MMM, élu haut la main à Manja.
Certains d’entre eux pensent pouvoir changer les choses de l’intérieur, mais ils seront, comme d’habitude, happés par le système, intégrés au réseau élitaire et oublieront très vite leurs convictions.
Comme un certain Edgar !
«Tout ce qui se passe va à l’encontre de l’intérêt de Madagascar. Les Malgaches vont élire de nouveau quelqu’un qui va piller leur pays et les étouffer (…) La colère de la population a toujours les mêmes causes, en l’occurrence, un pouvoir qui la méprise, une corruption généralisée, des dirigeants complices des trafics et qui ne pensent qu’à leurs profits personnels» .
Ce n’est pas quelqu’un de l’opposition qui a prononcé ces phrases prémonitoires. C’est un ministre actuel de Vazaha Menasofina, le champion de l’ODOF Edgar Razafindravahy. Il l’avait écrit dans son journal L’express de Madagascar en octobre 2018
https://lexpress.mg/31/10/2018/edgard-razafindravahy-les-malgaches-vont-elire-un-pilleur/ .
Edgar a maintenant été complètement intégré dans ce réseau élitaire.
Le salut de Madagascar pourra-t-il venir de la diaspora ?
Christine Jaulmes, représentante de l’UNICEF à Madagascar a dit « Il est urgent d’investir dans la formation d’enseignants qualifiés« , mais à Madagascar, elle semble prêcher dans le désert.
C’est ainsi que Vazaha Menasofina préfère réserver les rares postes budgétaires aux forces de l’ordre et aux pénitentiaires. Plus aucune embauche prévue pour les enseignants sortant de l’Ecole Normale Supérieure, au contraire des sortants de l’Académie militaire d’Antsirabe.
Heureusement que certains Malagasy de la diaspora accordent encore de l’importance à ce secteur éducation.
Le 27 juin prochain, se tiendront à Paris des échanges sur l’éducation à Madagascar. Selon le flyer, « 64 ans après l’indépendances, quel est l’état des lieux, les visions actuelles, les visions périphériques (Afrique & Monde), les alternatives ? Les programmes éducationnels d’hier auront des résultats demain : ce qui est décidé aujourd’hui sera récolté demain. Quelles alternatives pour la jeunesse dépositaire de l’avenir » ?
Il est vrai que Vazaha Menasofina musèle tous ceux qui osent critiquer sa gouvernance, jusqu’à des membres de la communauté internationale comme l’ambassadrice de l’Union Européenne dont il a demandé le rappel.
Même ceux disposant de l’immunité parlementaire s’auto-censurent, au vu de ce qui arrive à la député Masy Goulamaly en pleine session parlementaire (encore sous contrôle judiciaire !).
Seule, la diaspora garde encore une certaine liberté de parole, et encore ! Rajoelina avait vainement essayé de la décourager. Il avait par exemple fait convoquer par la police française l’ex-magistrate Fanirisoa Ernaivo et l’activiste Marco Randrianisa.
C’est ainsi qu’ « une association appelée FAMPIVONDRONANA ou RASSEMBLEMENT a été créée en Europe par les militants malgaches issue du mouvement de contestation des onze candidats qui s’étaient regroupés lors du dernier scrutin présidentiel sous la bannière d’ « Hetsika Fotsy » (« le mouvement pacifique ») pour en dénoncer les fraudes massives. Ces citoyens malgaches entendent mobiliser la diaspora pour soutenir tous les partisans du changement à Madagascar. Ils ont adopté́ à l’unanimité́ le slogan « TOFOKA AN’I RAJOELINA » (« RAS-LE-BOL DE RAJOELINA »), du nom du Président, pour s’opposer aux pratiques détestables de son mode de pouvoir ».
Vous pouvez lire le texte fondateur de cette association sur le site https://mondafrique.com/libre-opinion/madagascar-la-colere-gronde-contre-andry-rajoelina/ .
Concernant la diaspora, un autre colloque sur le thème « Démocratie et République à Madagascar » va également se tenir prochainement à Paris.
Ces différents initiatives vont-elles finir par porter leurs fruits et secouer ce réseau élitaire fermé ?
Il est permis d’espérer, malgré ce qu’affirmait un article paru en novembre 2018, intitulé « Madagascar : l’île trahie par ses élites« .
Cela constituera la dernière partie de notre dossier.