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Le Journal de l'île Rouge
La une

Ne sacrifions pas la génération future !

La gazette de la grande île
25/06/20248 minute read

Un article de l’économiste Serge Zafimahova, paru ce weekend dans le journal Lakroan’i Madagasikara, nous a interpelé. Nous en avons fait une traduction libre en espérant ne pas avoir trop déformé les véritables pensées de l’auteur.
Cet article de fond mérite une large diffusion auprès des intellectuels, auxquels ils s’adressent en particulier, étant donné la complexité du sujet abordé.

Selon les statistiques, plus de 80% des Malagasy vivent sous le seuil de pauvreté. Ce Malagasy se lève tôt le matin, et commence à se poser la question de savoir comment il va pouvoir donner à manger à sa famille. Pour ce faire, il va aller « travailler » durement toute la journée, et quand il revient chez lui la nuit, il est tellement fatigué qu’il s’endort tout de suite, souvent sans avoir mangé à satiété. Et il recommence le lendemain. Le dimanche, il s’accorde un moment de détente en allant au temple ou à l’église, et il reprend ensuite son traintrain quotidien.

Il n’a pas le temps de penser à la politique, et est tout heureux, lorsque de temps à autre sa famille reçoit du vary tsinjo, du tosika fameno, des cuvettes orange ou des jiron’akoho. Jiron’akoho, qu’il va devoir revendre très bientôt, afin de mettre un peu de beurre dans les épinards. Ainsi va sa vie !

Intellectuels, Officiers, vous tous les « Olomanga », levez-vous ! Quel Madagascar allons-nous laisser à nos enfants, à la génération future ?
Certes, nos enfants vont au lycée français, à l’Alliance Française, à l’American ou British School. Puis, quitte à nous saigner à blanc, nous allons les envoyer en France, au Canada, en Suisse, en Allemagne (souvent au pair), aux Etats-Unis, en Australie. Partout ailleurs, pourvu que ce ne soit pas à Madagascar. Il est rare que ces enfants-là reviennent ensuite au pays, trop heureux d’échapper au sort de leurs parents. Soit !
Mais quid de tous ceux qui ont dû passer par les maîtres FRAM ? Quid de tous ces étudiants qui doivent mendier le paiement de leurs bourses ?

Son jouet, le téléphérique

         

Stade Barea juste bon pour les Galas évangéliques

 

Ce n’est pas le téléphérique qui va changer leur sort ! Ni le Colisée ! Ni ce stade Barea non homologué, juste bon pour les Antsam-piderana ! Ni Miami ! Ni ce début d’autoroute ! Ni ces centrales thermiques de 105 MW, qui pourrissent au port car trop lourdes pour nos ponts !

Vazaha Menasofina et sa clique ne sait même pas qu’il n’y a plus de bus qui acceptent 500 ariary, puisqu’il ne les prend pas ! Il ne connaît pas les affres des voyageurs de tous les jours sur la RN1 par exemple. Même pour aller à Imerintsiatosika, pour visiter Tanamasoandro II, il avait pris l’hélicoptère !

Vazaha Menasofina n’est pas la solution, sinon cela se saurait depuis 6 ans (sans parler du quinquennat de la transition). Le peuple n’a ni le temps, ni la force de se soulever. C’est à nous Intellectuels de nous lever avec les étudiants de tous les lycées, de toutes les universités manarapenitra. Nous faisons déjà partie de la génération sacrifiée. Que nos générations futures ne le soient pas !

Nous savons que Vazaha Menasofina lit nos articles, et on s’en aperçoit par certaines décisions prises. Combien de fois n’avions nous pas parlé du manque de professionnalisme de ses collaborateurs ? Les nombreuses fates dans les comptes-rendus des conseils de ministres, et l’absence de leur version française. Nous sommes heureux de constater que le site de la présidence est enfin en cours de rénovation :

https://presidence.gov.mg/

Ci-après l’article de Serge Zafimahova :

CHANGEONS MAINTENANT 

Serge Zafimahova


Aucun des dirigeants successifs depuis la transition de 2010 n’a établi ou mis en œuvre une politique de développement en adéquation avec la situation du pays. Ce qui ne nous a pas permis d’exploiter les ressources naturelles et de mettre Madagascar à la place où elle aurait dû se trouver dans le concert des Nations.

Les changements de régime ont tous été le résultat d’un coup d’État sous couvert d’une légalisation et confirmation par des élections qui ont suivi. La politique menée est toujours restée un partage de sièges et une question de personnes.
La première raison en est la politique de l’attrape-tout : on séduit tous azimuts. Ainsi, la 1ère raison vient de ce que la plupart de tous ceux qui accèdent au pouvoir sont égoïstes et ne visent que des intérêts ethniques, des intérêts d’une minorité, et même des intérêts purement personnels.
La deuxième raison est l’absence de volonté de développer le secteur privé malagasy, livré à lui-même sans la protection ni l’assistance du gouvernement.

 Les intellectuels, les officiers supérieurs et les généraux, fiertés du pays, ont une grande responsabilité dans le sous-développement et l’absence de progrès à Madagascar, car ils se désintéressent et se taisent afin de protéger leurs propres intérêts. Le succès de quelques-uns ne doit pas cacher l’échec général, selon le dicton : un seul arbre ne fait pas une forêt.

 La pauvreté qui frappe la population depuis plusieurs décennies s’étend à l’ensemble de la population. On s’aperçoit qu’actuellement, la classe moyenne disparaît complètement, entre la classe supérieure et la classe des nécessiteux, qui comprennent les hauts et moyens cadres du secteur privé et de la fonction publique, tout comme le secteur informel (enseignants, médecins, artisans, ingénieurs, etc. Libéralisation, entrée mal contrôlée de nombreux étrangers, dont beaucoup ne peuvent justifier qu’ils soient rémunérés plus qu’ils ne valent; cela détruit le moral des Malagasy payés au lance-pierre et sous-évalue leurs compétences. Les PTF disent aux investisseurs étrangers que Madagascar est l’un des pays les plus prometteurs. Il est triste de voir que la seule lueur d’espoir, qu’on laisse entrevoir au peuple malagasy, soit la lutte contre la pauvreté, mais la richesse ne se résume pas à pouvoir manger du riz (Ny hani-bary tsy mba harena).

La pauvreté des Malgaches est-elle comme du sel tombé dans l’eau qui ne reviendra plus ? Continuer à survivre en quémandant l’aide ici et là, constituera-t-il le seul pilier et fondement de la politique du gouvernement?

 L’absence d’un projet clair dans les domaines social et économique, ainsi que les dommages causés à l’environnement sont des obstacles qui détruisent l’avenir des générations futures. L’insécurité et la croissance des activités des dahalos, surtout dans les zones rurales -où il y a eu pourtant une période où on les a contrôlées-, annihilent les efforts de tout un chacun, notamment des paysans, dans leurs efforts d’augmenter la production agricole.

Les pratiques suivantes entravent également le progrès : les mensonges diffusés par les médias d’État et la réapparition de la censure, les discours pleins de tromperies, de mensonges et d’hypocrisie, prendre la population pour des ignares, la fraude et les irrégularités lors des élections, les incitations de longue date aux conflits ethniques, la corruption devenue une habitude acceptée par tous, la mauvaise gestion de l’argent public, l’absence d’un Etat de droit, sont de véritables obstacles au développement.

 Près de 64 ans se sont écoulés depuis l’indépendance, mais il n’y a eu aucun développement dans les domaines social, culturel, économique et politique. Madagascar est devenu encore plus pauvre. Les droits humains fondamentaux sont ainsi bafoués. On continue à discourir, à faire des promesses, mais comme l’adage malagasy « un poulet, s’il n’a plus chanté depuis quelque temps, a dû être dévoré par un renard » .

La non-prise en compte adéquate des affaires politiques amènera immanquablement à l’abandon de la souveraineté nationale. Les bailleurs de fonds internationaux sont occupés à développer leurs politiques mais se soucient peu du développement réel.

La génération future devra déjà supporter une dette considérable qui a été imprudemment acceptée hier et aujourd’hui et restera endettée pour les nombreuses décennies à venir. Les privatisations ont avantagé les étrangers et ont exclu les Malagasy.

 Le déclin de l’économie et du niveau de vie vie de la population devrait réveiller les consciences et les prises de responsabilité.

L’économiste Serge Zafimahova

Serge Zafimahova

Nous publierons dans un prochain numéro un autre article de cet économiste intitulé « Téléphérique : l’exemple-type d’une dette odieuse », qui parle de ce « joujou » de Vazaha Menasofina ;

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