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Le Journal de l'île Rouge
Politique

Stature internationale : Redonne un peu d’espoir

La gazette de la grande île
03/07/202414 minute read

Des quadra/quinqua Malagasy encore dans la force de l’âge se sont distingués sur la scène international, et nous redonnent un peu de notre fierté d’être leur compatriotes. Mais surtout nous pensons que ce pays n’est pas irrécupérable, et la relève est déjà là.

1 KETAKANDRIANA RAFITOSON

Le 16 novembre 2023, un communiqué de Transparency International annonçait l’élection au poste de Vice-Présidente de Ketakandriana Rafitoson. Elle s’était présentée colistière du futur président François Valérian. Le cœur de leur programme reposait sur la mise en place d’une véritable riposte globale contre la corruption, face à la montée de régimes autoritaires, populistes ou kleptocratiques à travers le monde qui étouffent ou répriment la société civile. Elle était jusqu’alors directrice exécutive de Transparency International Madagascar (TIM), et coordinatrice de PCQVP (Publiez Ce Que Vous Payez).

        

        « Ke » élue Vice-Présidente                       Vazaha Menasofina 6ème Dan, levant les yeux au ciel

Le 28 mars 2024, l’organisation PCQVP a publié le communiqué suivant « Après une recherche globale, le conseil d’administration de PCQVP est ravi d’annoncer que Ketakandriana Rafitoson sera la prochaine directrice exécutive de PCQVP (à partir du 1er juillet 2024) » ICI .
PCQVP est une organisation britannique active dans une cinquantaine de pays, qui appelle à la transparence dans les industries extractives.
Pour Vazaha Menasofina qui aime tellement les CV ronflants, Ketakandriana Rafitoson est titulaire de deux doctorats, en sciences politiques et en sociologie appliquée au développement.

Ces distinctions sont passées presqu’inaperçues à Madagascar, et pourtant il y a de quoi être fier qu’elle ait porté haut le flambeau Madagascar et que pour une fois, ce n’est pas pour une affaire du type de celle de Romy Voos, ou des titres bidons comme champion du monde de la malnutrition ou de l’Industrialisation. Ou encore un fake 6ème dan de « Karato ».

A Madagascar, « Ke » avait commencé à être connue pour avoir rendu publics des soupçons de malversations dans l’utilisation des fonds Covid. Elle avait également osé s’attaquer au Président Bis Mamy Ravatomanga alias PB, en dénonçant la mainmise d’une poignée d’individus sur les exportations de litchis, sans transparence ni redevabilité. Transparency International Madagascar « a trouvé des preuves de nombreuses infractions potentielles, notamment de corruption transnationale, d’accords illicites, de fraude fiscale, de blanchiment et de dissimulation de ces infractions ».
Sans le soutien et l’indignation des ambassadeurs et des organisations internationales, elle aurait connu le sort de nombreux lanceurs d’alerte : le « gagazo » comme le disent les Malagasy, en référence au plat de manioc qu’on sert aux prisonniers.

TIM (pas celui de Ra8, mais Transparency International Madagascar) a transmis les documents en question aux Justices malagasy et française, et le procureur général du PAC Solohery Razafindrakoto en avait accusé réception depuis novembre 2022. Ce dossier doit probablement être mis sous le coude, ou même classé dans les profondeurs des archives du PAC. Aucune suite jusqu’à présent, malgré les promesses de Vazaha Menasofina de « Corruption Tolérance Zéro ».
Madagascar n’a même pas ouvert une enquête sur l’affaire Romy Voos, c’est dire l’embarras actuel de Vazaha Menasofina !
On espère qu’elle franchira le pas et osera rentrer dans le domaine politique.
Le lecteur pourra lire plus loin la transcription d’un article de notre confrère Le Monde sur cette patriote éclairée, qui montre le potentiel de cette jeune femme. Elle avait la possibilité d’aller s’expatrier à Londres, mais a fait le choix de rester travailler à Madagascar. Chapeau bas Madame !

2 SITENY RANDRIANASOLONIAIKO

Siteny est la 2ème personnalité malagasy reconnue au niveau mondial encore en exercice.
Vrai 6ème Dan en judo, Siteny avait été entraineur national de l’équipe nationale de judo avant d’être élu en 2009 président de la Fédération Malagasy de Judo. Il est directeur de développement de la Fédération Internationale de judo (FIJ)
Le 18 mai 2021, il a été élu Président de l’Union Africaine de Judo par 42 voix contre 9 pour son adversaire le Tchadien Abakar Aumi Djermah. . Et à ce titre, il devient Vice-Président de la Fédération Internationale du judo.

Il y a de quoi être fier également de voir un Malagasy reconnu par ses pairs africains. Mais curieusement, son retour à Madagascar après cette élection s’était fait presqu’en catimini.
Heureusement, Toliara a accueilli en héros son fils Siteny marqué par une forte émotion, notamment lorsqu’il a rappelé avoir été accueilli à 12 ans par son 2ème père le judoka Ashiqhoussen Mamodaly dit Asky, directeur de l’école Memorial School et Capricorne School de Toliara.
De nombreuse personnalités sont venues d’Antananarivo pour fêter cette élection, et accueillir Siteny comme il se devait. Le professeur Raymond Ranjeva « en tant que Raiamandreny » avait parlé de fierté des Malagasy pendant son allocution.

Siteny a devancé le candidat IRMAR Tinoka, Cyclope à Roulettes, lors des dernières élections législatives. La HCC vient donc de le déclarer officiellement député de Madagascar pour un 3ème mandat.

3 Ahmad Ahmad, Arlette Ramaroson et Raymond Ranjeva

Ces trois personnalités, reconnues sur le plan international, ne sont plus actuellement en exercice.

Ahmad Ahmad avait été élu le 16 mars 2017 président de la Confédération Africaine de Football (Caf). Il avait réussi le tour de force de détrôner le monument camerounais Issa Hayatou, qui dirigeait la CAF depuis 1988, soit près d’une trentaine d’années.

Ahmad Ahmad venait d’être élu député à Mahatsinjo

Arlette Ramaroson avait été élue le 24 avril 2001 puis réélue le 31 janvier 2003, par l’assemblée générale de l’ONU, juge pour le Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR).

                                 

Arlette Ramaroson à la TPIR

Raymond Ranjeva avait été élu en 1991, par l’assemblée générale de l’ONU, membre de la CIJ (Cour Internationale de Justice). Il avait été réélu en 2000 et était demeuré à ce poste jusqu’en 2009. Il en a été Vice-Président à partir du 6 février 2003 .

Le professeur Ranjeva vice-président de la CIJ

4 Rajaonarimampianina successeur de Moussa Faki Mahamat ?

Le 16 mars 2024, parut un article de Confidentiel Afrique « Commission de l’Union Africaine : L’ex-Président malgache Hery Rajaonarimampianina tient les cartes en mains.

 En entérinant le 15 mars 2024 à Addis Abeba (capitale de la République fédérale d’Éthiopie), la proposition du Comité des représentants permanents (COREP) de retenir le principe de rotation par ordre alphabétique pour le poste de président (et celui de vice-président) de la Commission de l’UA, les ministres des Affaires Étrangères de l’Union africaine (UA) ont lancé la course aux candidatures au sein de la région Est-Africaine. Dans le lot des prétendants, émerge le profil sans équivoque de l’ex-président malgache (2014- 2018), Hery Rajaonarimampianina, 65 ans, très actif en coulisse, et dont le nom commence à résonner dans les câbles diplomatiques autorisés et les réseaux sociaux du pays. Exclusivité de Confidentiel Afrique ».

ICI .

Une énorme chance et une grande fierté pour Madagascar d’avoir la possibilité de détenir ce poste important pour l’Afrique. On espère seulement que Vazaha Menasofina n’en sera pas jaloux, et répondra à la seule question qui en vaille la peine « Est-il de l’intérêt de Madagascar et des Malagasy qu’un de ses ressortissants soit élu président de la Commission de l’Union Européenne »? 
La réponse semble évidente, et les Malagasy attendent de Vazaha Menasofina qu’il affirme immédiatement son soutien inconditionnel à cette candidature de Rajaonarimampianina.

Ci-après l’article du Monde sur Ketakandriana Rafitoson : :

A Madagascar, Ke Rafitoson promue nouvelle vigie de l’extraction minière
ICI

La politologue malgache prend la direction du mouvement mondial Publiez ce que vous payez, dont la mission est d’obtenir davantage de transparence dans le secteur des industries extractives.

Ketakandriana Rafitoson avait de solides arguments et elle a tenu bon. Lundi 1 er juillet, elle prendra officiellement ses fonctions de directrice exécutive du mouvement Publish What You Pay − Publiez ce que vous payez − non pas à Londres, où se trouve le secrétariat du mouvement créé́ en 2002 pour contraindre les sociétés à déclarer les sommes qu’elles versent aux gouvernements contre l’attribution de titres miniers, mais à Antananarivo, la capitale de Madagascar, « pays parmi les plus pauvres, riche en minerais de transition et à la gouvernance déplorable », selon ses mots.
Quitte à faire les allers et retours en Europe.

« Les minerais nécessaires à la transition énergétique se trouvent dans les pays du Sud, mais dans quelles conditions sont-ils achetés par les sociétés occidentales ou asiatiques ? En quoi profitent-ils aux populations locales ? Pour le savoir et pour se mettre à l’abri de transactions opaques, c’est au Sud que nous devons être. Je serai très fière de servir depuis le cinquième pays le plus pauvre du monde », a-t-elle plaidé.

L’arrestation, quelques mois avant sa nomination, de la directrice de cabinet du président de la République malgache en flagrant délit de tentative de corruption de la société́ Gemfields a certainement parlé en sa faveur. Romy Voos Andrianarisoa, interpellée à Londres, en aout 2023, par l’agence britannique de lutte contre la criminalité́, cherchait à obtenir 10 % des parts de la société́ devant opérer à Madagascar et 260 000 euros de commission. Elle a été́ condamnée à trois ans et demi de prison en mai.

Une place à part

« Si l’affaire s’était passée ici, elle aurait certainement été étouffée et la vie aurait repris son cours.
Le manque d’indépendance de la justice est un problème constant, elle entretient l’impunité et ouvre une voie royale à la capture de l’Etat par des intérêts privés », condamne la quadragénaire, rompue aux pratiques de corruption qui, jusqu’au plus haut sommet de l’Etat, gangrènent la grande ile de l’Océan Indien.

A la tête pendant six ans [2018-2024] de la branche malgache de l’ONG Transparency International, elle a eu l’occasion d’explorer en profondeur les arcanes les plus sombres de cette collusion entre les élites politiques et économiques et d’en dénoncer quelques-uns des plus gros scandales. Le dernier en date étant, en 2022, l’entente entre le Groupement des exportateurs de litchis et deux entreprises françaises, permettant de contrôler la filière de commercialisation vers l’Europe à travers un circuit de financement opaque par l’ı̂le Maurice.

Comme souvent à Madagascar, où le plaignant finit par se retrouver sur le banc des accusés, la plainte déposée par Transparency International auprès du Pole anticorruption malgache et du Parquet national financier français a failli la conduire en prison. Cela ne s’est joué qu’à la mobilisation en sa faveur des chancelleries occidentales présentes à Antananarivo.

Le courage dont Ketakandriana Rafitoson fait preuve depuis toutes ces années, disant tout haut ce que personne d’autre n’ose dénoncer, lui vaut une place à part dans la société́ civile malgache. Sa nomination à la tête d’une association internationale présente dans une cinquantaine de pays − dont la majorité́ en Afrique – traduit cette reconnaissance.

Elle avait été́ précédée, fin2023, par sa désignation à la vice-présidence mondiale de Transparency International, elle-même partie prenante du réseau de Publish What You Pay. « Je me suis tournée vers Ke [c’est ainsi que tout le monde l’appelle] pour m’épauler parce que c’est une femme impressionnante d’intelligence, de combativité et de courage. Elle est animée par la passion de Madagascar et par son combat pour la justice et les droits humains qui la place toujours aux côtés des victimes des abus de pouvoir », témoigne François Valerian, élu, fin 2023, président de Transparency International.

Une jeunesse révoltée

Cet itinéraire qui lui offre aujourd’hui de devenir une figure incontournable de la lutte anticorruption commence il y a une vingtaine d’années, lorsqu’elle tourne le dos à une carrière de juge administrative. Par rejet, déjà̀, de la corruption. Elle a 21 ans, arrive major au concours d’entrée de l’Ecole nationale de la magistrature et se voit proposer un stage à la direction de la législation et du contentieux auprès du premier ministre. « J’ai découvert un univers où la loi était bafouée. Seuls comptaient les ordres donnés par le ministre. Ce n’était pas pour moi », se remémore-t-elle. Elle démissionne et ne prêtera pas serment.

Au grand dam de sa famille, dont les origines modestes ne permettent pas de concevoir qu’elle puisse renoncer à cet avenir assuré. Débute alors une période où elle enchaîne des missions de consultante pour des institutions internationales comme la Banque mondiale, puis un long contrat à l’Office de régulation de l’électricité́, où elle est chargée d’élaborer la réforme du code de l’électricité́. Cela n’aboutira pas. Le décret censé acter la réforme ne sera jamais publié́. La Jirama, compagnie publique d’électricité́, est toujours un gouffre financier, et l’accès à l’énergie reste parmi les plus bas du monde.

Parallèlement, elle oppose à la déliquescence de son pays, mis à l’index de la communauté́ internationale après le coup d’Etat de 2009 qui porte au pouvoir l’actuel président, Andry Rajoelina, jusqu’en 2013, un engagement citoyen toujours plus militant.  Inspirée par l’histoire du mouvement pacifiste américain et par la doctrine sociale de l’Eglise catholique, dans laquelle elle puise son désir de justice.

A l’époque, les Etats-Unis encouragent discrètement l’activisme d’une jeunesse révoltée qui aspire à la démocratie. C’est sous leurs auspices que naitra en 2010 le mouvement Liberty 32, auquel Ke prend part. Liberty parce que Point Liberty est l’adresse de l’ambassade américaine à Antananarivo ; 32 parce qu’ils sont trente-deux jeunes à avoir été́ invités à rencontrer une conseillère de Barack Obama de passage à Madagascar. Puis, en 2013, lorsque la situation politique se normalise avec l’organisation d’élections, elle crée le mouvement Wake Up Madagascar pour inciter ses concitoyens à s’exprimer dans le débat public. « Nous étions imprégnés de culture américaine. Nous rêvions de voir chez nous cette fibre patriotique au service de la défense des droits civiques », se souvient-elle.

Sa jeunesse et sa radicalité́ étonnent. « C’était une jeune femme, simple et directe, habillée d’un jean, tee-shirt et baskets dans un univers masculin et âgé », raconte Mialisoa Randriamampianina, sa vieille complice rencontrée sur les bancs de l’Université́ catholique de Madagascar. Car la nouvelle présidente de Publish What You Pay est aussi l’autrice de deux thèses de doctorat, réalisées pour « crédibiliser [son] action et ne pas être seulement perçue comme une fauteuse de troubles ». La première, en sociologie, porte sur la doctrine sociale de l’Eglise comme levier de développement; la seconde, en science politique, sur la société́ civile à Madagascar depuis les années 1980.

Ke Rafitoson est restée simple, même si chacune de ses interventions est désormais précédée par une longue séance de selfies, à la demande de jeunes qui voient en elle un modèle et un espoir dans leur pays sinistré. C’est aussi pour eux et pour ses quatre enfants, qu’elle ne voulait pas déraciner, qu’elle a choisi de rester et de faire de son ı̂le un poste avancé de l’observation des miniers.

Laurence Caramel « 

Félicitations à cette génération montante qui pourra peut-être, nous osons l’espérer, renverser la tendance actuelle. Afin que Madagascar ne soit pas seulement un Tanindrazana où l’on revient pour mourir ou pour être enterré, mais surtout un Taninjanaka où nos enfants pourront enfin vivre heureux, comme l’avait écrit le pasteur Rahajason.
« Ty Nosindrazanay ity,
Hiadana sy ho Finaritra
He ! Sambatra tokoa izahay
« 

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