Vazaha Ratandrametaka alias Radomelina Vazaha
« Tandremo sao manao manarapenitr’i Rajoelina, ka zara fa vita sy tandrametaka » (Faites gaffe à ce que Rajoelina qualifie d’être aux normes, ce n’est que du vite fait, MAL FAIT) : c’est devenu un des thèmes de rigolade entre jeunes Malagasy!
Pour nous mettre au goût du jour, nous allons désormais délaisser « Radomelina Vazaha » au profit de « Vazaha Tandrametaka », dans nos articles.
TGV
Il était une fois, un jeune homme de 33 ans en 2007, de bonne famille et bien marié, qui avait une notoriété certaine auprès de jeunes Malagasy en tant que DJ et créateur d’évènements. Selon le journal Courrier International « il avait une réputation flatteuse d’entrepreneur de génie dans le monde de la communication et de manager reconnu pour son professionnalisme ».
Le 3 novembre 2007, il avait déclaré vouloir briguer la mairie d’Antananarivo, pour le scrutin des communales du 12 décembre 2007 avec son parti Tanora malaGasy Vonona (TGV).
Il avait alors défait Hery Rafalimanana le candidat du TIM, grâce notamment au parrainage d’un certain Herizo Razafimahaleo.
Du TGV au Tandrametaka
L’allusion au Train à Grande Vitesse était claire, et profitait clairement à son image : le choix de ce sigle illustrait parfaitement son sens de la communication. Hélas, la communication a ses limites et ne suffit pas. Comme disent les Américains, « DO IT RIGHT AND LET IT BE KNOWN » (Faites le bien et faites-le savoir, autrement dit, prenez les bonnes décisions et faites-les connaître). La communication est nécessaire, mais elle n’est malheureusement pas suffisante.
C’est bien de faire savoir rapidement, mais ne pas confondre non plus vitesse et précipitation. Dans le compte rendu du conseil des ministres du 28 août 2024, est annoncée la décision de nommer des ambassadeurs aux Etats Unis et au Maroc. On précise ensuite que ces nominations ne seront effectives qu’après l’agrément des pays concernés. De la vitesse, oui ! Mais les us et coutumes diplomatiques veulent qu’on ne communique sur la nominations d’un ambassadeur qu’après réception de l’agrément.
Un autre exemple du » tandrametaka » : aucune version française du compte rendu des conseils des ministres, excepté celui du 7 août 2024.
A-t-on atteint le seuil d’incompétence à la présidence ?
A titre d’exemple, 3 « projets présidentiels » (les mots magiques qui débloquaient tout, et permettaient tous les abus), symboliques du Tandrametaka Zara Fa Vita :
Stade Barea
-Début janvier 2020, les travaux de rénovation du stade de Mahamasina débutaient sous la houlette du coordinateur de l’IEM (Initiative Emergence de Madagascar, pour mémoire) Andriamanohisoa Gérard, devenu entretemps secrétaire d’Etat auprès de la Présidence en charge des nouvelles villes et de l’habitat.
77 millions de dollars et 21 mois plus tard, Vazaha Tandrametaka inaugurait le 4 septembre 2021 en grande pompe, en présence de Mialy et d’Arena son fils, le stade rebaptisé Stade Barea.
Ce stade était alors réceptionné comme répondant aux normes de la FIFA, comme précise le site de la présidence. https://www.presidence.gov.mg/actualites/informations/sport-et-culture/1366-stade-barea-mahamasina-inauguration-en-grande-pompe.html .
Dès les 1ères gouttes de pluie en novembre 2021, l’accès au stade était devenu « une piscine olympique ».
Hélas deux ans après l’inauguration, le 25 août 2023, lors de la cérémonie d’ouverture des jeux des îles, une bousculade a causé la mort de 12 personnes, dont 7 enfants. Et a fait 80 blessés, dont 10 grièvement. Les entrées de ce stade manarapenitra n’étaient même pas pourvues de tourniquets permettant de décompter les entrées. Résultat d’un travail tandrametaka, vite fait très mal fait ! Rappelons que Vazaha Tandrametaka n’a même pas présenté ses condoléances aux familles éplorées, ni rendu visite aux blessés ! Une forme de mépris incompréhensible !
Et à ce jour ce stade manarapenitra, ou plutôt un stade zara fa vita sy tandrametaka, n’a toujours pas reçu l’homologation de la CAF, obligeant Madagascar à jouer le prochain match aller des Barea contre les Comores à Radès en Tunisie.
Colisée
-Ce monument anachronique, constitué d’un amphithéâtre en béton, est vu comme un mépris flagrant et institutionnel de la culture malagasy. Adieu l’ancienne piscine sacrée du roi Andrianampoinimerina, à la place de laquelle on a bâti ce colisée.
Vazaha Tandrametaka a complètement mis de côté la dimension spirituelle du Rova pour les Malagasy. Aucun lien architectural avec l’environnement immédiat du Rova ! Incohérence dans le choix des matériaux utilisés : du béton alors que le palais est en granit !
Sans oublier le risque géologique lié au poids de cet ouvrage : des éboulements mortels sont à déplorer sur cette colline tous les ans !
Bref, un monument fait à la va vite et mal fait, sans concertation ! Un colisée tandrametaka.
D’ailleurs, c’en est sans doute fini de l’inscription de la haute ville au patrimoine de l’Unesco.
Autoroute Toamasina Antananarivo
-Le 3 décembre 2022, lancement des travaux de construction de l’autoroute reliant Antananarivo à Toamasina :
Des rizières ont été remblayées, et on n’a même pas attendu la récolte et les propriétaires ne sont pas indemnisés à ce jour. Des travaux commencés sans une étude sérieuse des impacts environnementaux. Le DG de l’ONE (Office National de l’Environnement) Rija Herisolo Rakotoson a osé dire lors d’une conférence de presse en mai 2023 que ce projet n’avait pas encore bénéficié de permis environnemental. Il avait alors immédiatement été limogé, contrairement à Peterson Leonardo Ranaivosoa, directeur des études et de l’évaluation environnementale du ministère des travaux publics.
Vazaha Tandrametaka a préféré « casser le thermomètre » pensant ainsi faire baisser la fièvre.
En tout cas, début juillet 2024, une quarantaine d’ONG environnementales – dont la Fondation pour les aires protégées et la biodiversité de Madagascar, le Fonds mondial pour la nature (WWF), Conservation International (elle assure la gestion du corridor Ankeniheny/Zahamena CAZ qui serait coupé en deux dans le tracé actuel de cette autoroute)- demande la suspension des travaux qui vont mettre en péril 10% de ce qui restent comme forêts primaires.
CAZ a une superficie de 370 000 hectares a déjà reçu de la Banque Mondiale une 1ère tranche de 8,8 millions de dollars, sur un total de 50 millions de dollars. Incertitude sur les tranches à venir !
Enfin, le tracé actuel empiète sur la colline royale d’Ambohimanga, berceau de la dynastie merina. Ce qui a conduit l’Unesco à brandir des menaces de déclassement de ce site culturel, inscrit au patrimoine mondial.
En résumé, un travail tandrametaka à la va vite, qui ne tient pas compte de toutes les dimensions !
Mardi dernier, Vazaha Tandrametaka a reçu Carlos Manuel Rodriguez le PDG du Fonds pour l’Environnement Mondial (FEM). C’est le plus gros bailleur au monde en matière de luette contre la perte de diversité, les changements climatiques, la pollution et les pressions exercées sur la santé de la terre et des océans.
Madagascar est membre de cette organisation depuis 1994 et a déjà bénéficié d’un financement de 200 millions de dollars. Vazaha Tandrametaka négocierait actuellement avec cet organisme un financement de 100 millions de dollars pour la période 2026/2030. Ce PDG sera certainement approché par les ONG environnementales, qui ne manqueront pas de lui parler des graves problèmes environnementaux posés par le tracé de l’autoroute.
Des ministres TGV
Début juillet 2024 à Toamasina, Vazaha Tandrametaka disait encore après la démission du PM » Je veux accélérer la vitesse du développement et je le dis d’emblée. Pour les dirigeants qui n’arrivent pas à suivre le rythme, je ne pourrais pas vous tracter. Le mieux serait de s’arrêter. Il n’y a plus d’excuses. Ceux qui ne sont pas performants vont descendre. Seuls ceux qui sont à la hauteur vont monter ».
Les membres du nouveau gouvernement sont avertis : prioriser la vitesse à la qualité ! Avec la contraction du budget, que vont pouvoir faire ces ministres avec le peu dont ils disposent ? Sinon du tandrametaka !