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Le Journal de l'île Rouge
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« Madagascar et la Géopolitique du Pauvre »

La gazette de la grande île
28/01/202512 minute read

Rajoelina SAFIOTRA a donc ordonné que « toutes les valises diplomatiques passent désormais par un scanner sans exception« . Connaît-il seulement les dispositions de la Convention de Vienne qui élabore les grandes lignes des règles de droit diplomatique. Ce dernier sait-il tout simplement ce que recouvre ce mot « diplomatie » ?
La diplomatie est un des domaines régaliens, en d’autres termes, un domaine du ressort de l’exercice de la puissance gouvernante Rajoelina SAFIOTRA. Certes on ne peut pas tout savoir, mais on se doit au moins de s’entourer de gens qui savent comme un vrai leader le ferait.

Le conseiller spécial diplomatique Patrick Rajoelina

Le parcours du franc maçon Patrick Rajoelina, son conseiller spécial en diplomatie et coopération internationale (selon son CV LinkedIn), justifie-t-il sa nomination ?

                          

                                           

Patrick Rajoelina au 1er rang en grande tenue

 

Que penser de la compétence de ce conseiller spécial qui met en exergue ses origines dans son CV :

On comprend mieux ces bourdes diplomatiques de Rajoelina SAFIOTRA.

Le président du Sénat Korotamby

La lecture de ce CV rappelle d’ailleurs un autre membre du 1er cercle de Rajoelina SAFIOTRA, ce général qui a mis en avant dans son CV ses « exploits » au CEG et au lycée : « Major aux concours d’entrée en classes de seconde et terminales : BACC série C.
On est tenté de penser qu’il n’a obtenu que la mention passable au BACC série C, sinon il l’aurait très certainement précisé dans son CV.

Le président du sénat, le général Korotamby, avait assuré l’intérim de la présidence de la République. En cas d’indisponibilité de Rajoelina SAFIOTRA, il sera de nouveau appelé à assurer l’intérim et à ce titre aurait la responsabilité de la diplomatie. A-t-il les qualités nécessaires pour une telle fonction ?

Clausewitz avait dit, s’agissant du rôle de la diplomatie « La guerre est le prolongement de la politique par d’autres moyens« . Et un général ne serait donc pas le moins qualifié pour la mise en œuvre de la politique étrangère d’un pays.
Cependant, force est de constater que ses récentes déclarations ne semblent pas militer dans ce sens.
Affirmer dans un média étranger, lors de sa visite à Moscou dans le cadre de la diplomatie parlementaire, que « les embouteillages sont une des preuves que les Malagasy ne sont pas pauvres ! Tout comme le nombre élevé de Malagasy sortant des supermarchés avec des caddies remplis à ras bord » !
Vous pouvez visionner cet interview sur le site https://m.vk.com/wall-216965535_87973 .

Korotamby n’est pas un sénateur élu, mais un sénateur nommé par Rajoelina SAFIOTRA. Ce président du sénat est donc un choix délibéré, et non imposé à lui.

                         

Ne pas avoir nommé un ambassadeur auprès de l’ONU depuis 2019 est un autre signe de la non-maitrise de la diplomatie par Rajoelina SAFIOTRA.
Heureusement ses jours sont comptés, car le désespoir des Malagasy qui meurent de faim est tel que ce serait un calvaire de penser le voir finir son mandat.
Nous avons choisi de publier un article de notre ami Lalatiana Pitchboule, paru le 16 janvier 2025 dans le journal en ligne Madagascar Tribune et qui nous avait échappé, et auquel nous avons emprunté le titre de cet article : https://www.madagascar-tribune.com/Madagascar-et-la-Geopolitique-du.html . Un guide et des réflexions pour les futurs dirigeants, afin qu’ils ne répètent pas les mêmes erreurs diplomatiques commises par Rajoelina SAFIOTRA.

                                  

«  On évoque la notion de « géopolitique du pauvre » pour décrire la manière dont les nations matériellement fragiles tentent de se frayer un chemin dans les dynamiques internationales. Leurs profondes vulnérabilités structurelles — dépendance économique, instabilité institutionnelle, faiblesse de la gouvernance — les enferment dans des rapports asymétriques sur la scène internationale… D’autant que les défis endogènes qu’ils affrontent, tels que la lutte contre pauvreté ou contre la corruption, réduisent considérablement leur marge d’initiatives. La capacité de ces pays à peser sur l’échiquier stratégique mondial relève ainsi de la gageure.

« J’ai l’illusion d’agir librement, mais en réalité, je reste soumis aux stratégies et aux intérêts de mes principaux bailleurs ». Fahaleovantena hoy izy. Les financements externes, cruciaux pour combler les déficits budgétaires ou soutenir quelques rares projets fondamentaux, s’accompagnent par ailleurs de conditionnalités strictes qui limitent encore davantage l’aptitude de ces gouvernements à définir de manière autonome leurs politiques publiques.

La vulnérabilité financière de ces pays s’accentue d’autant que leur économie est dominée par des secteurs insuffisamment diversifiés. Les termes défavorables de l’échange, quand ils se fondent principalement sur l’exportation de matières premières brutes ou de produits agricoles, les voient dangereusement exposés aux aléas et diktats des marchés mondiaux. La dépendance de la Grande Ile aux envois à l’extérieur de vanille, de nickel ou de graphite, pour ne citer que ces postes-là, rend le pays particulièrement sensible aux crises globales. Lesquelles crises impactent directement ses revenus et ses capacités d’investissement. La pandémie de la Covid-19 en a fourni une illustration marquante.

Le président, avec sa nouvelle marotte, qui veut faire du tourisme le cœur du développement économique de la Grande Ile devrait en tirer leçon : le risque d’une dégradation du transport aérien ou d’une résurgence pandémique aura-t-il été envisagé quand il lancera les projets futurs de Dubai sur Mitsio ?

La « géopolitique du pauvre » met ainsi en lumière un flagrant manque de poids diplomatique de ces pays sur la scène transnationale. Qui peut donc croire que les pays pauvres ont la moindre capacité d’influencer les décisions mondiales (pour peu que ces dernières aient encore du sens). Ils se contentent souvent d’un rôle de suiveurs dans les grandes messes charlatanesques internationales où ils marchandent en général leurs voix pour l’intérêt géopolitique immédiat d’un groupe ou d’un gros acteur …

La « géopolitique du pauvre » se caractérise également par le penchant de certains dirigeants à l’engagement de dépenses somptuaires, excessives, souvent superflues, ostentatoires ou disproportionnées et généralement engagées dans des logiques d’affichage de prestige ou d’image de puissance, plutôt que pour répondre à des nécessités pratiques ou économiques.

La quête de distinctions honorifiques (souvent accordées par des officines obscures) au titre de « Dirigeant visionnaire de l’année » ou autre billevesée relève de cette logique. Ces démarches, supposées améliorer leur positionnement diplomatique ou flatter l’opinion publique, masquent cependant un profond décalage entre les véritables priorités nationales et l’ambition personnelle du leader.

Enfin, la « géopolitique du pauvre » se caractérise par une fragilité institutionnelle aggravée. Dans ce contexte, la faiblesse de l’État se manifeste par des administrations dysfonctionnelles, une corruption par trop généralisée et une incapacité à mener à bien des réformes structurelles. Madagascar illustre de manière frappante un cercle vicieux : ses autorités peinent à assurer des services publics essentiels, alimentent ainsi un cercle infernal de pauvreté … et l’ensemble sape la crédibilité du pays sur la scène mondiale.

Pris dans ce cycle pervers, les nations économiquement fragiles s’épuisent à courir après le prestige et à nouer des alliances déséquilibrées, au lieu de consolider leurs bases internes. En occultant leurs priorités fondamentales et en négligeant de recentrer leurs politiques nationales sur les défis économiques, sociaux et institutionnels cruciaux, ils tirent eux-mêmes sur le frein à main de leur développement.

Politique extérieure et développement ne devraient-ils pas s’alimenter mutuellement dans un cercle vertueux ? Une diplomatie économique ciblée efficiente ne serait plus le frein à main serré, mais l’accélérateur de la voiture progrès. Des réformes internes ambitieuses et une croissance inclusive renforceraient la crédibilité du pays, lui donnant les moyens de peser à l’international. C’est là une lapalissade que de l’énoncer. Mais on la voit mal adoptée par les tenants du pouvoir.

Il est peut-être temps d’adopter une voie alternative pour prendre le contrepied de la géopolitique du pauvre. Dans un pays structurellement limité par ses faiblesses économiques, institutionnelles et géographiques, il faut être conscient (c’est dur à énoncer) qu’on ne rattrapera jamais les niveaux de l’économie des pays occidentaux … Et qu’on rattrapera très difficilement ce qu’ont atteint certaines nations africaines de référence. Il est urgent d’adopter des stratégies réalistes, pragmatiques et ancrées dans nos atouts spécifiques.

Ne pourrait-on pas s’inspirer d’un modèle de type Bhoutan et du paradigme d’un « Bonheur National Brut » qui valoriserait les ressources locales et leurs chaines de valeur, renforcerait la sécurité alimentaire en priorisant l’agriculture vivrière et investirait dans des énergies renouvelables adaptées promouvant l’autosuffisance énergétique au lieu de chercher à rivaliser avec ces modèles européens …

Ne pourrait-on pas se concentrer sur des alliances stratégiques Sud-Sud, nous aligner sur des causes globales en nous affirmant (REELLEMENT et non pas par des déclarations de principes pour faire joli) leader dans la protection de la richesse de nos écosystèmes ?

N’arriverait-on pas à construire une économie de niches compétitive avec des produits agricoles de haut de gamme, un écotourisme de qualité focus sur la biodiversité pour attirer des flux de visiteurs à forte valeur ajoutée sur le modèle du Costa Rica au lieu d’embarquer le bateau Madagascar dans des projets de tourisme de masse sur un modèle pharaonique Émirati ?

Ne pourrions-nous pas nous voir exportateurs de services spécifiques et de talents dans les domaines de l’informatique ou de la santé ? Plutôt que de chercher à concurrencer les grandes puissances économiques, le pays ne pourrait-il pas se spécialiser ici sur des secteurs où il dispose d’un avantage comparatif unique ?

N’est-il pas temps, comme au Vietnam, de prioriser l’éducation de base et la formation professionnelle, de réduire les inégalités sociales et territoriales et d’investir pleinement dans la santé publique pour satisfaire les objectifs de croissance d’un BNB et non plus d’un PNB auxquels veulent nous contraindre les grands argentiers.

Et on ne dissertera pas sur la nécessité de mettre en place un Etat minima, mais efficace qui se concentrerait sur les domaines essentiels que sont la justice, la sécurité, les services publics, la lutte contre la corruption et favoriserait une véritable décentralisation pour adopter une gouvernance axée sur la transparence et l’efficacité … Comme a su le faire le Botswana.

Ici, on ne fera pas comme certains qui déclarent que « pour augmenter le PIB par habitant, il faut réduire le nombre d’habitants ». On fera de la démographie un atout en investissant dans les jeunes, en soutenant l’économie informelle au lieu de la combattre [1] et en mobilisant de manière pertinente et efficiente les expatriés de la diaspora pour des transferts de compétences, d’investissements et de capitaux à l’instar des Philippines [2].

Plutôt que de viser une industrialisation massive ou une imitation des modèles linéaires occidentaux, ne serait-il pas pertinent d’adopter ENFIN des stratégies alternatives basées sur la durabilité. Notre retard socioéconomique est PEUT ETRE UN ATOUT s’il nous permet, de manière forcée il est vrai, de choisir une autre voie de développement caractérisée par des modèles de croissance inclusive, de développement circulaire [3] et de progrès mesuré par des indicateurs alternatifs.

Le Costa Rica, pour le citer encore, a choisi de ne pas investir massivement dans l’armée, préférant se concentrer sur l’éducation, la santé et la conservation environnementale. C’est ce genre d’intelligence et de courage qu’i faudrait éveiller au lieu de rêver de Miami sur Pangalanes, de Dubai sur Mitsio ou d’importation de girafes et d’éléphants… Encore faut-il pour cela être capable de vision, d’humilité et de générosité.

Un modèle de succès réaliste qui prendrait le contrepied de la géopolitique du pauvre réside dans l’abandon des ambitions de prestige ou des tentatives d’imitation des grandes puissances. En reconnaissant nos propres limites, notre pays peut bâtir un modèle de développement durable, centré sur nos atouts, nos spécificités et les besoins de notre population. Cette approche réaliste, qui combine résilience locale, gouvernance efficace et diplomatie ciblée, peut permettre de transformer les faiblesses structurelles en leviers d’innovation et de prospérité.

Plutôt que de rêver d’un rattrapage impossible, à l’agenda que personne n’ose plus écrire il s’agit d’inventer une voie propre, adaptée et inspirante… Et arrêter de se raconter des histoires, enfermés dans le déni.

Patrick Rakotomalala (Lalatiana PitchBoule) – 14 Janvier 2025″

 Notes :

[1] Plutôt que de stigmatiser l’informalité comme un problème, il est crucial de reconnaître qu’elle constitue une réponse aux contraintes structurelles (chômage, faible accès aux capitaux) et qu’il faut penser à Intégrer l’informalité dans les politiques publiques.
[2] Les Philippines ont fait de leur diaspora une force économique majeure à travers les transferts financiers et l’exportation de services.
[3] Réduire le gaspillage et maximiser l’utilisation des ressources disponibles

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