Tollé général en France ! Madagascar fait la UNE, pas pour la grande pauvreté de sa population cette fois, mais pour la compétitivité de sa main d’œuvre responsable de pertes d’emplois français.
La nouvelle fait grand bruit dans tous les médias, des politiciens de tout bord s’indignant de la fermeture d’une unité de confection de l’entreprise Marck & Balsan, qui y employait 65 salariés.
Cette société venait de perdre un appel d’offres de l’armée française pour la confection d’uniformes militaires au profit de la société française Paul Boyé Technologies.
Cette dernière aurait décidé de sous-traiter à Madagascar une partie de cette commande représentant 10 % de la valeur ajoutée. Elle y disposerait une entreprise disposant d’une main-d’œuvre d’environ 1 000 personnes, pointant le manque de main-d’œuvre qualifiée en France.
Un des sites de l’armée française y consacre un article https://armees.com/polemique-autour-de-la-fabrication-des-uniformes-de-larmee/ .
Quel crime ! Comme si la confection d’uniformes militaires revêt un caractère stratégique !
Ce psychodrame franco-français se déroule dans un contexte où le président TRUMP vient de décider l’instauration de droits de douane de 25 % sur certains produits venant du Mexique et du Canada, et de 10 % sur certains produits importés de la Chine. Alors même qu’il existe un accord de libre-échange entre le Canada, le Mexique et les États-Unis, entré en vigueur depuis le 1er juillet 2020.
Et ces politiciens français oublient trop vite l’accord de SAMOA.
L’accord de SAMOA
Après les conventions de Lomé, l’accord de Cotonou permettait aux 79 pays ACP (Afrique-Caraïbes-Pacifique) d’exporter vers l’Union Européenne sans droits de douane, ni de restrictions quantitatives. Pourquoi alors un tel charivari pour cette « importation » de main-d’œuvre qualifiée ?
Le 1er janvier 2024, le nouvel accord de SAMOA entrait en vigueur, remplaçant l’accord de Cotonou.
Madagascar a ratifié cet accord le 1er juillet 2024, sans avoir apparemment bien pesé préalablement les engagements qu’il implique :
Madagascar est notamment tenue de promouvoir, protéger et garantir les droits de l’homme, les principes démocratiques, l’État de droit et la bonne gouvernance, de mobiliser l’investissement, soutenir les échanges commerciaux et encourager le développement du secteur privé, de mettre en œuvre une approche globale et équilibrée de la migration, d’éradiquer la pauvreté et de combattre les inégalités. Ces objectifs sont précisés dans la deuxième partie de cet accord, dédiée aux priorités stratégiques au nombre de six : « Droits de l’homme, démocratie et gouvernance au sein de sociétés axées sur les personnes et fondées sur les droits, paix et sécurité, développement humain et social, croissance et développement économiques inclusifs et durables, durabilité environnementale et changement climatique et migration et mobilité« .
Il faut bien comprendre que cet accord de SAMOA ne s’arrête donc pas aux conditionnalités de l’aide aux droits de l’homme et au développement durable. Il s’immisce maintenant dans toutes les sphères de la société africaine, caribéenne et pacifique, ne laissant plus que peu de marge de manœuvre aux pays ACP.
Rajoelina l’a découvert, à ses dépens, lorsque Mme Delattre Burger s’est élevée contre la Loi introduisant la castration pour les violeurs d’enfants. « De quel droit », s’est offusquée notre MAE qui a demandé dare-dare le rappel de cette ambassadrice de l’Union Européenne ?
Pourtant, enfin une professionnelle des relations internationales, selon son CV au MAE, s’auto-persuadaient ses collègues ministres après les ternes prestations de Richard Randriamandranto et Patrick Rajoelina alias LLNBV ? PhD du CEDS Paris avec mention très honorable, et Major de promotion de l’ENAM !
Ce CV sur LinkedIn rappelle furieusement notre général Korotamby et son CV de CEG.
Sortir deux « communiqués officiels » sur le même objet en moins de 24 heures ne fait pas très professionnel, et dénote un certain embarras de Rajoelina SAFIOTRA.
On comprend qu’il fallait effectivement « purger » le 1er communiqué :
-« principes de solidarité et de coopération régionale » a été remplacé par « engagement de solidarité avers tous les Etats membres de la région de l’Afrique Australe« . Il est vrai que le Rwanda n’est pas un pays membre de la SADC.
-« En sa qualité de membre actif de la Troïka de la SADC » laisse place à « En tant que membre de la Troïka de la SADC« . Pourquoi cette soudaine modestie ? Il n’est plus un membre actif ?
Ce communiqué a sans doute été rédigé à l’intention des Malagasy, pour louer le « leadership politique » du leader bien-aimé Rajoelina SAFIOTRA.
Peuple malagasy, n’oubliez pas que Rajoelina SAFIOTRA va bientôt se rendre à Casablanca pour recevoir son prix de « Leader politique africain de l’année 2024« , après avoir battu en finale deux présidents de pays membres de la SADC, Les Seychelles et la République Démocratique du Congo.
-« Madagascar reconnaît pleinement sa responsabilité de contribuer à la recherche de solutions et à la gestion des conséquences des conflits au sein des Etats membres » est devenu une phrase beaucoup plus modeste et plus neutre « Madagascar réaffirme son engagement en faveur de la paix et de la sécurité dans la région« .
-L’expression classique « Sous l’autorité du Président de la République » a disparu par magie.
-« Une équipe de médecins militaires formés et expérimentés à faire face au contexte actuel dans l’Est de la RDC« . La deuxième partie a purement et simplement disparu. Sans doute, Rajoelina SAFIOTRA a voulu y envoyer des médecins militaires manarapenitra, mais on se demande où ces médecins auraient acquis des expériences de soins dans des pays en guerre.
-Le 1er communiqué parle d’une aide humanitaire de 5 millions de dollars de l’Angola, dont peu de Malagasy ont connaissance, et qui a disparu purement et simplement du 2ème communiqué, à juste titre.
Rajoelina SAFIOTRA découvre que la langue diplomatique a son code, ne permet pas d’improvisation et doit souvent naviguer entre sincérité et duplicité, paroles honnêtes et mensonge, vérité et fausseté, transparence et secret.
Hasard ou coïncidence, « exportation de médecins malagasy »
De nombreuses publications ont paru sur les réseaux sociaux à la suite de ces communiqués, la plupart critiquant la décision. Nous empruntons une illustration vue sur la page de plusieurs internautes qui résument les sentiments de la majorité de ces internautes.
Comme par hasard, le CNG (Centre National de Gestion des praticiens hospitaliers) vient de sortir le 31 janvier 2025 la liste des praticiens ayant satisfait aux épreuves de vérification des connaissances. Il s’agit de médecins n’ayant pas un diplôme de docteur en médecine délivré dans un des Etats de l’UE, qui postulent pour venir travailler en France.
Le lecteur pourra consulter cette liste sur le site du CNG/ : https://www.cng.sante.fr/sites/default/files/media/2025-01/liste-laureats-evc-2024.pdf
Quelques Malagasy figurent dans cette liste (comme les listes des années précédentes), ainsi que le lecteur pourra le constater. Selon les confidences de certains de ses collègues, l’actuel ministre de la Santé avait postulé, mais avait échoué à ces épreuves de vérification des connaissances. 104 Malagasy auraient déjà fait partie de ce programme selon les réseaux sociaux. A-t-il envie de quitter la barque ?
Le CAMES (Conseil Africain et Malgache pour l’Enseignement Supérieur) délivre le titre de professeur agrégé, à des médecins africains et malgaches, à la suite d’un concours rigoureux.
Depuis Ra8, Madagascar délivre maintenant le titre de professeurs à certains médecins malagasy, dont le ministre actuel de la Santé.
Tout comme les maîtres FRAM datent du temps de Ra8, leurs collègues africains surnomment maintenant les professeurs agrégés malagasy (en dehors du système CAMES) d’agrégés FRAM.
Des agrégés à la pelle partout, alors que le niveau des impétrants et des plateaux techniques est en totale décrépitude. Une des raisons pour lesquelles nos hauts dirigeants partent se faire soigner, à Maurice ou à la Réunion, à la moindre grippe.
Toujours est-il qu’on exporte maintenant des médecins compétents pour combler les déserts médicaux de la France, au détriment du système de santé malagasy. Les meilleurs s’en vont !
Tout comme on va exporter maintenant nos médecins militaires. Des médecins malagasy dans un pays en guerre ? Cela rappelle les paroles d’un jeu entre enfants malagasy des années 60 : « Aza misy miady fa mifanekera, raha misy maratra, Izaho no dokotera ».
Mais là, il ne s’agit malheureusement pas d’un jeu.
Ne faudrait-il pas plutôt y envoyer notre armée de généraux, avec Korotamby à leur tête ?