À quelques jours de votre séjour en terre malgache, dans le cadre du sommet de la Commission de l’Océan Indien, il est utile d’attirer votre attention sur la réalité locale et l’enjeu autour de votre visite.
Mais préalablement, je me permets de vous faire observer que depuis quelques jours, un rappel des faits entourant l’accession au pouvoir de M. Andry Rajoelina refait surface, par une grande diffusion de déclarations de ses anciens compagnons de putsch, avec preuves à l’appui, mais aussi des documents officiels compromettants, sur sa participation directe dans les tueries du 7 février 2009, précédant à sa première accession au pouvoir, et dont il est le principal instigateur. Toutes ces publications sont aussi accompagnées des innombrables scandales de trafics de bois de rose et d’or, dont la population malgache redécouvre aujourd’hui, l’implication directe de celui qui aura l’honneur de vous accueillir bientôt.
Évidemment, on ne peut parler de M. Andry Rajoelina sans évoquer les conditions dans lesquelles il a de nouveau renouvelé son dernier mandat, puisque l’on a découvert, pendant la campagne électorale de 2023, qu’il a été naturalisé français en 2014, décret signé par Manuel Valls, Premier ministre de l’époque. Par conséquent, et selon l’article 42 de la loi, il perd automatiquement sa nationalité malgache et ne devait donc pas obtenir l’autorisation de candidater aux dernières élections présidentielles.
Monsieur le président de la République, est-il besoin de vous rappeler que M. Andry Rajoelina cumule plus d’une dizaine d’années de pouvoir, et qu’il a fait de Madagascar l’un des pays les plus pauvres au monde. L’écrasante majorité de la population vit en dessous du seuil de pauvreté (+ de 82%, critère Banque Mondiale), dans des conditions indignes, car le manque d’eau et d’électricité, plonge le pays dans un contexte presque moyenâgeux. Évidemment, vous n’y verrez rien de tout cela, parce que depuis deux mois, toute l’administration est réquisitionnée pour donner les meilleures apparences à la ville d’Antananarivo, jusqu’à décréter le jour de votre arrivée, un jour chômé.
Mon propos est de vous aviser sur les enjeux locaux de votre passage : la pratique du pouvoir de M. Andry Rajoelina va vers une dérive totalitaire, qui est l’instrument de sa totale impuissance dans la résolution des problèmes économiques auxquels il doit faire face. Cela surprend à peine, car la corruption qui gangrène l’administration, prend sa source au niveau même de la présidence. Personne n’ignore que la concentration de tous les pouvoirs entre les mains du seul chef d’état, est la première source de l’aggravation de la crise sociale qui explosera inévitablement. Les contrepouvoirs sont aujourd’hui mis à l’étouffoir, les individus qui les composent ne sont que de simples marionnettes. L’opposition est totalement muselée et les intimidations et les menaces d’emprisonnement sont permanentes.
Monsieur le président de la République, s’il vous faut rappeler que M. Andry Rajoelina est illégitime, votre venue représente pour lui une bénédiction pour atténuer cet affront que la population malgache lui fait. Le peuple malgache sera très attentif à vos déclarations et à vos gestes. Il vous reproche d’être bienveillant à l’égard de celui qui est à l’origine de leur malheur. Vous avez une extraordinaire opportunité de taire la francophobie qui se nourrit de la supposer complicité de la France avec ce pouvoir quasi dictatorial. Vous devez saisir cette occasion pour réaffirmer l’attachement de la France aux valeurs de liberté et de Démocratie et que celles-ci ne sont mieux défendues que par ceux qui en sont convaincus.
Monsieur le président de la République, sachez que votre venue est attendue, elle l’est d’autant plus qu’elle répondra à la seule question qui vaille : seriez-vous du côté de la population malgache ou non ?
Un ami du JIR