Depuis des siècles, les empires, cités-États et les nations ont adopté des politiques offensives en matière de commerce, de fiscalité et d’investissement dans le but d’accroître leur richesse. Après la Grande Dépression et la Seconde Guerre mondiale, un consensus mondial s’est imposé autour de la libéralisation du commerce international, de la coopération économique et des marchés ouverts. Ce modèle a permis à de nombreux pays d’accéder à une croissance économique durable et de réduire la pauvreté.
Actuellement, ce consensus s’effondre. L’ordre économique mondial se redessine, un nouveau mot d’ordre gagne du terrain : le nouveau nationalisme économique. Ce virage stratégique, adopté par de nombreuses grandes puissances, repose sur un retour à l’intervention de l’État dans l’économie, au protectionnisme, et à des politiques industrielles ciblées. Après des décennies d’ouverture des marchés, ce recentrage national est présenté comme un moyen de sécuriser la souveraineté économique et de renforcer les chaînes de valeur locales.
Mais pour les pays en développement, et notamment pour Madagascar, cette nouvelle dynamique mondiale s’apparente moins à une opportunité qu’à un piège.
Depuis des années, Madagascar fait face à des défis structurels profonds : une gouvernance fragile, une corruption systémique, un endettement préoccupant et une inflation chronique. Dans ce contexte déjà instable, l’émergence du nouveau nationalisme économique sur la scène internationale ne fait qu’aggraver les failles existantes. Loin de corriger les déséquilibres, il contribue à renforcer les logiques clientélistes, à obscurcir davantage la gestion des ressources publiques, et à éloigner encore plus la population d’un développement inclusif.
Ce nouveau paradigme économique, qui privilégie les intérêts nationaux des puissants au détriment des pays vulnérables, fonctionne selon une logique de compétition brute : un jeu à somme nulle dans lequel les plus forts gagnent, et les plus faibles — comme Madagascar — perdent davantage. L’endettement s’intensifie sans vision stratégique, l’inflation continue de miner le quotidien des ménages, et les perspectives de croissance restent incertaines.
Madagascar n’a pas besoin d’un modèle importé fondé sur la confrontation économique, mais d’une stratégie ancrée dans sa réalité : un modèle qui mise sur la création de richesse par le travail, la valorisation des compétences locales et l’initiative individuelle. Le pays a besoin d’un plan national fondé sur la bonne gouvernance, la transparence, l’investissement dans le capital humain et le développement d’une économie locale résiliente. Ce sont ces piliers qui ouvriront la voie à une véritable émergence et à une réduction durable de la pauvreté.
Dans un monde en mutation, il est temps pour Madagascar de bâtir une voie propre, indépendante des cycles de dépendance et des mirages idéologiques. Le défi est immense, mais il est aussi urgent.