Selon les plaintes que nous avons reçues et la réalité au sein de la Police Nationale, il semble que peu voire aucun budget de fonctionnement ne soit alloué à cette institution. Cette triste réalité, indéniable, met en lumière le fait que ceux ayant affaire avec la Police Nationale doivent supporter financièrement les moindres faits et gestes des agents chargés de leurs dossiers. Pour illustrer cette situation, prenons l’exemple des victimes de vols, contraintes de couvrir les frais de déplacement et de nourriture des enquêteurs en charge de leurs cas.
Lorsque la police identifie une piste concernant un vol, par exemple un vol de moto, les enquêteurs demandent au propriétaire de la moto volée de financer leurs déplacements vers la zone indiquée par leur informateur. En plus de ces frais de transport, ils imposent également un budget pour les repas de chaque agent mobilisé. Souvent, ces pistes ne débouchent sur rien de concret, ce qui signifie que le propriétaire doit continuer à payer chaque fois qu’une nouvelle piste est explorée. Il est troublant de constater que ce sont les enquêteurs eux-mêmes qui sollicitent ces paiements. Cette pratique est connue de tous les responsables au sein de la Police Nationale, mais malgré son impact négatif sur l’image de cette institution, elle persiste.
Une fois un suspect arrêté, les enquêteurs demandent encore au propriétaire de l’objet volé de financer le transport du suspect jusqu’au tribunal pour la comparution. Même lorsqu’un suspect est placé en détention à Antanimora ou à Tsiafahy, les agents chargés du transport réclament une fois de plus de l’argent pour assurer le transfert vers la prison.
Si le propriétaire ose refuser, les agents de police adoptent une attitude intimidante, menaçant de conduire les prisonniers à pied et d’attribuer la fuite potentielle des prisonniers à l’attitude du plaignant.
Un exemple plus précis : une responsable du Tribunal d’Anosy a rapporté que jeudi dernier, deux suspects menottés, accompagnés d’un agent de police du nom de Christ, ont été laissés sans surveillance dans la salle d’attente du tribunal. L’un des suspects utilisait même un téléphone portable malgré ses menottes. Cette responsable a entendu l’agent de police, Christ, solliciter de l’argent auprès des victimes présumées du vol afin de les transporter jusqu’à Tsiafahy.
Exiger des frais de déplacement et de nourriture auprès des victimes de vol est une pratique hautement préjudiciable à l’image de la Police Nationale. Cette pratique mine davantage la confiance de la population envers cette institution. Il est anormal que la Police ne dispose pas des budgets nécessaires pour mener à bien ses missions. Ce sont ces agents, adoptant de mauvaises habitudes, qui ternissent la réputation de la Police. Les nombreuses lettres de plaintes que nous recevons ici à New York soulignent la prévalence de ce problème, ce qui est alarmant. Il est tout à fait compréhensible que, à Madagascar, les victimes de vol préfèrent résoudre leurs problèmes elles-mêmes, plutôt que de s’en remettre aux autorités, sachant qu’elles risquent de perdre encore plus d’argent.