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Le Journal de l'île Rouge
Politique

L’ombre de « Mamy » Ravatomanga plane sur la compagnie ferroviaire Madarail

La gazette de la grande île
21/06/20245 minute read

Ancien détenteur de 75 % du capital de la société Madarail, l’homme d’affaires Maminiaina Ravatomanga, proche de la présidence, s’intéresse de nouveau à cette compagnie ferroviaire. Mais cette fois-ci comme facilitateur.

Publié le 21.06.2024 à 4h40 GMT Lecture 4 minutes

Depuis quelques semaines, Maminiaina Ravatomanga, dit « Mamy », patron du consortium Sodiat et éminence grise du président Andry Rajoelina, s’active en coulisses. Il œuvre pour que la société grecque Dana Group concrétise un engagement de reprise de 75 % des parts de la compagnie ferroviaire Madarail. Le directeur général de Dana, Stelios Tzitzis, est surtout connu en Grèce pour ses activités d’armateur et de transporteur maritime.

Dans un premier contrat, signé en juin 2023, la filiale Dana Minerals avait obtenu le permis de la Kraomita Malagasy (filiale de Kraoma) pour l’exploitation du chrome située dans l’est de l’île. Une activité qui a démarré en mars.

Mais un second contrat, signé à la même date, et que Mamy Ravatomanga avait fortement favorisé, est, lui, toujours au point mort. Il s’agissait d’une convention de cession d’actions signée par Stelios Tzitzis avec la Société nationale de participations (Sonapar), dirigée par Woel Lala Herilaza. Par ce contrat, Dana Group s’engageait à acquérir les 75 % d’actions détenues par la Sonapar dans Madarail. Le prix de cession s’établissait à environ 15 millions de dollars, une somme considérée par certains experts comme bien supérieure à la valorisation de Madarail, actuellement estimée aux alentours de 2 millions.

Depuis des mois, Mamy Ravatomanga presse la société grecque de concrétiser ce rachat. C’est pour cette raison que Stelios Tzitzis a rencontré, mi-mai, la ministre des affaires étrangères, Rafaravavitafika Luciana Rasata, à Antananarivo. Les autorités malgaches voudraient que la société grecque leur verse, a minima, un acompte de 2 millions ou 3 millions de dollars, ce que la compagnie grecque n’a toujours pas fait.
Manque à gagner

Dana Minerals est dirigé par Georgios Tyligadas et Dieudonné Razafindrazaka. Le second est également associé à un homonyme du premier, Kostantinos Tyligadas, dans une société dénommée Dishio Services, basée à Antananarivo, au Business Mining Center d’Ivato, et spécialisée dans le gros œuvre minier. Dieudonné Razafindravaka dirige aussi, seul cette fois-ci, la société Hephalu, qui a le monopole sur la confection des permis biométriques.

Mamy Ravatomanga avait acquis en 2011 les 75 % de Madarail dans le cadre de la privatisation de cette compagnie qui exploite les trois lignes du réseau nord de Madagascar (Antananarivo-Côte est, Moramanga-lac Alaotra, Antananarivo-Antsirabe). Après ce rachat, un amendement avait été introduit dans le contrat de vente portant sur un programme de renouvellement des voies ferrées que devait financer l’État malgache avec l’aide de la Banque mondiale (BM). Mais le président de l’époque, Hery Rajaonarimampianina, avec lequel Mamy Ravatomanga entretenait de mauvaises relations, n’a pas tenu cet engagement. Dès lors, sans cette rénovation, l’activité de Madarail a périclité, passant de 450 000 tonnes (t) de fret en 2011 à seulement 60 000 t en 2019 (soit l’équivalent de son activité de 2003).

À la suite de l’élection d’Andry Rajoelina à la présidence, fin 2018, la question d’un nouveau plan de relance de Madarail s’était posée. En 2020, la BM, alors dirigée à Antananarivo par Marie-Chantal Uwanyiligira, avait donné son accord à un programme d’investissements de 230 millions de dollars, mais en y mettant une forte condition : que Mamy Ravatomanga disparaisse du capital de Madarail en vendant ses parts. Ainsi, en 2022, l’État a demandé à la Sonapar de faire le portage des parts de Madarail vendues par Ravatomanga. Sous la surveillance de la BM, le prix de cession a alors été fixé à 3,8 millions euros. Mais, deux jours après la vente, Ravatomanga a réclamé un dédommagement. Selon lui, l’État, en n’ayant pas tenu ses engagements de rénovation des voies ferrées, est responsable d’un manque à gagner sur les dividendes qu’il aurait pu percevoir via la hausse programmée de l’activité ferroviaire.
Paiement injustifié

En avril 2022, sensible à son argumentation – ou à son influence –, l’État lui a accordé une importante rallonge de 11 millions d’euros décaissée par le Trésor public. Ce paiement a été considéré comme injustifié – voire comme douteux – par la BM, qui a, dans la foulée, décidé de mettre un terme à son projet de financement pour Madarail. Parallèlement, la Société financière internationale (SFI-IFC), bras de la BM pour le secteur privé, qui travaillait sur la recomposition des actionnaires du secteur qui devaient reprendre les 75 % portés par la Sonapar, a également arrêté son projet.

Depuis 2022, aucun investissement n’est intervenu, contraignant Madarail à fonctionner sans fonds de roulement, avec une activité en hausse par rapport à 2019, mais qui stagne à 165 000 tonnes par an, loin des 450 000 tonnes de 2011.

Pour relancer un éventuel nouveau projet d’investissement financé par les donateurs internationaux, l’État malgache doit trouver un ou plusieurs partenaires privés disposés à acquérir les 75 % de parts du capital de Madarail et ayant l’aval de la BM. Mamy Ravatomanga s’est donc démené pour mettre Dana Group dans la course, sans que cette compagnie grecque soit, pour l’instant, en mesure de financer cette transaction. Sollicité par Africa Intelligence, Mamy Ravatomanga n’a pas répondu.

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