La récente condamnation du journaliste en ligne Patrick Raharimanana à cinq ans de prison avec sursis et à une amende de deux millions d’ariary a suscité une onde de choc au sein de la communauté journalistique malgache et internationale. Son crime présumé ? Avoir partagé sur sa page Facebook le programme de déplacement de Andry Radomelina, une information qui avait déjà été publiée sur la page officielle (ou du moins perçue comme telle) de la Présidence de la République.
L’affaire soulève des questions importantes, non seulement sur la liberté de la presse, mais aussi sur la transparence et la responsabilité des autorités malgaches. Il est paradixal que Raharimanana soit poursuivi pour avoir partagé une information rendue publique par une page Facebook présumée officielle de la Présidence. Si le partage d’une telle publication est jugé illégal, il est légitime de se demander pourquoi la page elle-même n’est pas également soumise à des sanctions.
La question de la légitimité de la page Facebook de la Présidence
Une première interrogation porte sur le statut même de cette page Facebook. Aucune loi claire n’affirme qu’il s’agit d’une page officielle. Si cette absence de statut légal est avérée, la page peut-elle être considérée comme une source officielle d’informations gouvernementales ? Et si ce n’est pas le cas, pourquoi Raharimanana est-il sanctionné pour avoir partagé un contenu qu’il aurait pu légitimement percevoir comme public ?
Cette incohérence révèle une application potentiellement sélective de la loi. Si Patrick Raharimanaa est condamné pour avoir simplement partagé une publication déjà disponible en ligne, pourquoi la page de la Présidence, qui a elle-même diffusé l’information, n’est-elle pas inquiétée ? En toute logique, si l’action de Raharimanaa est répréhensible, alors celle de la page Facebook qui a publié en premier lieu le programme devrait l’être aussi.
Liberté de presse et intimidations
L’affaire Raharimanaa met également en lumière la fragilité de la liberté de la presse à Madagascar. Les journalistes, déjà confrontés à un climat de censure et d’autocensure, voient dans cette condamnation un message inquiétant : le simple partage d’informations, même rendues publiques par des sources gouvernementales, peut être interprété comme un acte criminel. Cet épisode pourrait entraîner un refroidissement général de la couverture journalistique sur les questions sensibles du pays, d’autant plus que des lignes floues sont tracées entre ce qui est jugé légal et illégal.
Vers une condamnation sélective ?
Si la loi est appliquée de manière juste et égale, la logique voudrait que la page de la Présidence soit elle aussi examinée sous le même angle juridique. Si cette page n’a pas de statut officiel, sa gestion et ses publications doivent faire l’objet d’une régulation plus stricte. L’application des lois ne devrait pas être sélective ni servir d’outil pour museler les voix critiques ou journalistiques.
En conclusion, l’affaire Patrick Raharimanaa révèle des contradictions dans l’application des lois et jette un doute sur la transparence des actions des autorités. Plutôt que de servir de simple acte punitif contre un journaliste, elle pourrait bien marquer une nouvelle étape dans la remise en question de la liberté d’informer à Madagascar.